Les élections de juin 2024 arrivent à grands pas. Nous sommes appelés à élire nos représentants aux niveaux fédéral, communautaire et européen. Nous avons parcouru les programmes des partis francophones (Défi, Ecolo, Les Engagés, MR, PS, PTB) à la recherche de propositions concernant les politiques du handicap. Dès lundi 6 mai, nous vous partagerons donc les comparatifs de nos revendications et des propositions des partis. Les programmes des six partis francophones sont consultables en ligne dans leur entièreté.
Nos 35 revendications se déclinent selon 6 thématiques brièvement présentées ci-après : Politiques transversales, Soins de santé, Aidants proches, Enfance, Enseignement, Vie adulte.
Politiques transversales
Onze ans après la condamnation de l’Etat belge et ses entités fédérées par le Comité Européen des Droits Sociaux, nous constatons que les gouvernements de la Région de Bruxelles-Capitale et de la Région wallonne ne se sont toujours pas dotés de listes d’attente centralisées, structurées et transparentes qui permettraient une connaissance précise des besoins. Une étude de l’ULB publiée en 2023 confirme le manque criant de services et réponses adaptées mais ne quantifie pas les besoins en fonction du nombre de personnes concernées. Malgré l’existence d’une conférence interministérielle rassemblant tous les niveaux de pouvoir et d’un plan handistreaming, il n’y a pas de programmation coordonnée d’ouverture de services. Or, les plans “grande dépendance” et “autisme” adoptés par les gouvernements restent lettre morte et ne sont pas déployés. Aucune réflexion n’a été entamée sur un autre modèle de financement des services inspiré du PVB flamand (budget personnel qui suit la personne, utilisable pour tout type de service, à domicile ou dans une collectivité). Il est dès lors indispensable de rehausser les allocations de remplacement de revenu et d’intégration au-dessus du seuil de pauvreté pour toutes les personnes étant dans l’incapacité de travailler.
Soins de santé
Les soins de santé sont souvent une source de discrimination pour les personnes les moins autonomes. Il arrive fréquemment que des médecins et établissements hospitaliers leur refusent les soins généraux et spécifiques par manque de formation du personnel et de protocoles d’accueil adéquats. Paradoxalement, certains soins ne sont pas remboursés par l’INAMI aux enfants et adultes plus gravement atteints. C’est notamment le cas des soins logopédiques dont le remboursement est refusé en cas d’autisme ou de QI (quotient intellectuel) en-dessous de 86. La prévention et les aides à la grande dépendance sont réparties différemment sur le territoire belge. Alors que la Communauté flamande s’est dotée d’une assurance autonomie, la partie francophone du pays en a abandonné l’idée, malgré une assez longue période de réflexion à ce sujet.
Aidants proches
Pour assurer l’avenir des personnes les plus fragiles, ce sont les parents, très souvent les mères, qui investissent un temps considérable dans l’accompagnement de leur enfant en situation de grande dépendance. Les réductions du temps de travail, voire la perte d’emploi, sont fréquentes et représentent un risque accru de paupérisation de ces familles. Une allocation de remplacement de revenu doit être garantie à tout aidant proche. Il est en outre essentiel de soutenir les familles dès l’annonce du handicap, et de maintenir ce soutien tout au long de leur parcours de vie par la guidance parentale aux bonnes pratiques éducatives et l’offre de services de répit adaptés aux types de handicap et aux besoins de chacun.
Enfance
Les interventions adaptées au cours de la petite enfance sont primordiales pour éviter le développement de handicaps supplémentaires d’origine éducative (manque de stimulations). Les coûts des thérapies et des déplacements étant élevés pour les familles, il est indispensable que des allocations majorées soient accordées en fonction des besoins réels de l’enfant. Or, nous constatons depuis quelques années une politique d’allocations à la baisse ! Les crèches doivent accueillir tous les enfants, sans discrimination. Il faut former les intervenants de la petite enfance à la détection précoce des signes de handicap et notamment d’autisme ainsi qu’à leur accompagnement spécifique. Il faut élargir la capacité des centres de diagnostic face à l’augmentation des demandes due à une meilleure information du public et des professionnels. Les programmes de stimulation précoce et intensive recommandés doivent être offerts à tous les enfants concernés. De même, il faut que l’utilisation des bonnes pratiques recommandées et validées par la communauté scientifique s’impose, ainsi qu’une évaluation obligatoire de celles-ci. Les pratiques obsolètes, coûteuses et souvent inutiles ou délétères, ne peuvent plus être subsidiées par les pouvoirs publics.
Enseignement
La scolarisation pour tous les enfants est une obligation et un droit. Les Conventions internationales ratifiées par la Belgique enjoignent les Etats d’organiser un enseignement inclusif et non discriminant. L’inclusion dans le réseau ordinaire doit devenir la norme : les aides de l’enseignement spécialisé peuvent s’intégrer dans les écoles ordinaires suivant les modèles d’inclusion scolaire existants en Europe. Les enfants en situation de handicap nécessitent un encadrement spécifique par des enseignants obligatoirement formés et supervisés ainsi que des aménagements spécialisés. Des PIA adaptés aux compétences de chacun doivent être conçus en collaboration avec les parents. En outre, les enfants en situation de handicap subissent une discrimination supplémentaire étant exclus des garderies extra-scolaires, et cela est inacceptable. Les transports scolaires, dont ils bénéficient en raison des trajets plus longs vers les écoles spécialisées, engendrent de nombreux problèmes qui doivent être résolus. Les enfants non scolarisés en raison de leur handicap doivent être recensés et bénéficier de programmes d’accompagnement alternatif spécifiques. La transition vers l’âge adulte, une fois l’école terminée, doit aussi être assurée.
Vie adulte
A l’âge adulte, les personnes handicapées qui quittent l’école ou le centre spécialisé reviennent pour la plupart à la maison, privés d’activités et courant ainsi le risque de perdre une partie de leurs acquis. Bruxelles compte 7.293 allocataires adultes de grande dépendance, la Région wallonne en compte 27.868 (chiffres du SPF Affaires sociales – avril 2024). Le manque de places d’accueil est criant en Fédération Wallonie-Bruxelles car les budgets dédiés à la vie adulte sont largement insuffisants. L’offre doit être plus flexible et notamment prévoir la création de petites structures à caractère familial, mieux adaptées aux personnes avec des besoins intenses d’accompagnement. De même pour les activités journalières et de valorisation sociale. Comme est déjà le cas en Flandre, les personnes en situation de grande dépendance et/ou d’urgence sont à considérer prioritaires. Elles doivent pouvoir compter sur des normes d’encadrement renforcées (au moins 30%) et des structures d’observation et accompagnement spécialisé en cas de troubles complexes du comportement et de la communication. Le système des budgets personnalisés doit perdurer et se développer davantage, au-délà de la réflexion sur l’adoption éventuelle d’un budget inspiré du PVB flamand. Les personnes souhaitant vivre chez elles doivent toutes pouvoir bénéficier d’aides à la vie journalière (AVJ). Enfin, pour pallier le manque de places, la Région bruxelloise doit activer l’ordonnance concernant l’attribution de 1.000 m² des zones bâtissables d’intérêt régional aux infrastructures pour la grande dépendance.