C’est devenu un marronnier dans le secteur du handicap, mais il n’existe toujours pas en Belgique de recensement de la personne handicapée. Impossible donc de connaître avec efficacité et précision les besoins de cette population. Difficile aussi d’anticiper et d’évaluer les projets d’ouverture de places, étant donné que personne ne peut dire combien de personnes sont actuellement sans solution. Il en est de même pour les inscriptions à l’école. Actuellement, impossible de dire combien d’élèves en situation de handicap sont déscolarisés. Ce manque de données constitue un obstacle à l’élaboration de politiques ciblées à leur égard.
C’est avec la condamnation de l’État belge en 2013 par le Comité Européen des Droits Sociaux que les gouvernements régionaux furent contraints de mettre en place des Plans Grande Dépendance, lesquels contenaient déjà une exigence de recensement pour la population handicapée.
En 2014, le Phare et la COCOF avaient publié une étude concernant les besoins des personnes en situation de handicap de grande dépendance et de leur entourage. Pas un véritable recensement, mais une recherche permettant d’avoir déjà une idée du manque de places. Malheureusement, cet observatoire a cessé ses activités en 2017.
Ce cadastre des personnes handicapées est demandé par le secteur depuis de nombreuses années. En 2018, nous réalisions une vidéo sur le plan grande dépendance, en soulignant qu’un recensement n’avait jamais encore été réalisé :
Mais c’est finalement à l’été 2019, avec la prise en fonction de Rudi VERVOORT (PS) comme ministre en charge de la politique d’aide aux personnes handicapées, que la question du recensement refait surface : oui, selon M. VERVOORT, il y aura un recensement pour cette législature !
Et entretemps, plus rien.
Aux dernières nouvelles, pendant le confinement, le cabinet VERVOORT nous indiquait que le recensement était en cours. Retardée par le confinement, une étude a été lancée, mais les premiers résultats sont attendus pour, au plus tôt, 2022… Cinzia AGONI, porte-parole du GAMP et maman d’un adulte à besoins spécifiques, s’exprimait dans un reportage Investigations de la RTBF :
Le temps des politiques n’est pas le temps des parents !
D’autant plus que le cadastre n’est que la première des mesures à prendre. Combien de temps les familles devront-elles encore attendre ? Combien d’élections encore ? La situation est urgente et il n’est plus permis aux parents d’attendre plus longtemps.
Début 2021, Céline FREMAULT, cheffe de groupe CDH au parlement bruxellois francophone, avait interpellé le ministre Alain MARON (Ecolo) pour rappeler l’importance d’un tel recensement, y compris pour la vaccination, qui “aurait pu être grandement facilitée par le recensement de la personne handicapée que nous demandons depuis de nombreuses années“.
Plus récemment, c’est le député Emin OZKARA (député indépendant) qui a interpellé le ministre VERVOORT par une question écrite, laquelle demandait des informations sur l’état d’avancée du recensement.
- Suite à l’appel d’offres, c’est le Brussels Studies Institute qui s’est vu attribuer le marché. Celui-ci a été notifié en juillet 2021 et l’étude a débuté au mois de septembre. Cette étude s’étendra sur 12 mois.
- Le Brussels Studies Institute a mis sur pied un groupe de recherche multidisciplinaire composé de différentes départements de l’ULB comme le Centre de droit public et social, DULBEA, et ACTE (déjà occupée par l’étude pour la Maison de l’Autisme). Le Kenniscentrum WWZ a aussi été convié, étant donné qu’il avait mené une étude similaire en Flandres.
- Un comité de pilotage a aussi été mis en place. Il a pour objectif d’encadrer l’exécution du marché et est composé de membres de la COCOF, d’Iriscare, du Collège réuni, de l’Observatoire Social Santé, des cabinets Vervoort et Maron et est présidé par la fonctionnaire dirigeante de la COCOF.
Alors qu’au début de 2020, le cabinet nous annonçait un cadastre pour début 2022, nous apprenons désormais que l’étude du cadastre ne sera pas terminée avant septembre 2022 ! Il est donc certain que le recensement définitif ne sera pas connu avant début 2023, c’est-à-dire la fin de la législature (les prochaines élections étant prévues pour mai 2024). Pour celles et ceux attendant ce cadastre depuis bien avant les élections, la nouvelle peut avoir un goût amer…
Pour aller plus loin :