Corine, membre du GAMP et écrivaine du livre “Les replis de l’Hippocampe” (Bamboo Éditions) nous partage l’article qu’elle a fait paraître dans la revue L’Appel du mois dernier !
Les carences de l’État belge dans l’accueil et la prise en charge des personnes handicapées de grande dépendance.
Bang ! » Non, je ne compte poser de bombes nulle part. Mais ce n’est pas l’envie qui me manque, tant me révolte la situation des personnes handicapées de grande dépendance (un pour cent de la population belge) et leurs familles à bout de souffle. Les cas lourds, les cas difficiles, les cas sévères, dont beaucoup font partie du trouble du spectre autistique, sont les laissés-pour-compte des pouvoirs publics. Si, la plupart du temps, on nous montre des autistes à haut potentiel, genre le virtuose ou le mathématicien de haut vol, la réalité est tout autre. La majorité d’entre eux est frappée d’un double, voire d’un triple diagnostic. Et même si beaucoup ont des dons et des talents particuliers, il s’agit surtout de profils très dépendants ayant besoin d’un accompagnement spécifique. C’est dès l’enfance qu’il faudrait les faire bénéficier de bonnes pratiques éducatives, comportementales et développementales, comme celles mises en place au Canada, par exemple. Et qui maximisent leurs chances de devenir le plus autonome possible. Une étude de l’observatoire de la COCOF (Commission communautaire française) et le CEDS (Comité européen des droits sociaux) estiment à plusieurs milliers le nombre de ces personnes à charge des familles, rien qu’à Bruxelles. Honte !
Et pauvres, en plus !
Les parents, et en particulier les mères, arrêtent de travailler pour se consacrer à l’enfant handicapé. Le couple, souvent, ne résiste pas et la mère se retrouve seule contrainte de vivre du revenu de remplacement octroyé à l’enfant devenu adulte. Si, par extraordinaire, une place dans un lieu de vie se libère, elle perd ce revenu. Donc : soit elle y renonce, soit elle se retrouve à la rue. Paupérisation et isolement social feront d’ailleurs l’objet, le 3 décembre prochain, d’une étude présentée par le Service public fédéral de programmation (SPP) Intégration sociale et le Service public fédéral (SPF) Sécurité sociale sur la relation entre pauvreté et handicap en Belgique. Études. Réunions. Séminaire. Débats. Soirées. Conférences. Colloques. Séances. Sessions. Symposium. Congrès. Conciles. Ah, s’il pouvait y avoir autant d’actions concrètes pour améliorer le sort de ces personnes handicapées que d’initiatives se contentant d’en discuter !
De quel droit ?
Nos responsables politiques ne cherchent-ils qu’à se donner bonne conscience ? À faire croire aux parents qu’ils bougent, alors que leur politique en la matière fait du surplace ? Malgré la condamnation, en 2013, de l’État belge par le Comité européen des droits sociaux. Malgré l’article 19 de la convention ONU relative aux droits des personnes handicapées qui définit leur droit à l’autonomie et à l’inclusion dans la société. Article que la Belgique a signé et ratifié en 2009 ! Et qu’en est-il du fameux décret inclusion 2014 toujours pas entré en vigueur faute d’arrêtés d’exécution ? Il y a eu quelques avancées : un lieu de vie par-ci, une halte-répit par-là. La Coupole, par exemple, ouverte en 2014, mais qui ne dispose que de quinze places. Sa liste d’attente s’allonge tous les jours. Et ses collaborateurs ne sont pas assez nombreux, faute de subsides. Différentes associations tentent bien de pallier les carences de l’État belge, mais c’est un changement profond des mentalités et des décisions portant sur le long terme que les familles attendent de la part de nos gouvernements successifs. Le GAMP (Groupe d’action qui dénonce le manque de places), dont le nom fait penser à une détonation, se bat depuis quinze ans pour faire bouger les lignes. Ses membres n’ont qu’un rêve : dissoudre le groupe. Car cela voudra dire que le droit des personnes handicapées et leur famille à vivre dignement aura enfin été gagné.