Nous vous l’avions annoncé en juillet dernier, l’inclusion des personnes en situation de handicap allait être inscrite dans la Constitution belge. Le Sénat avait d’abord voté en faveur du texte et, hier, le 11 mars 2021, la Chambre fit de même, entérinant définitivement ce changement de Constitution.
La Constitution est sans doute le texte politique le plus important de notre pays. C’est le texte qui sert de règles du jeu politique dans un Etat de Droit, et qui encadre juridiquement nos institutions.
Depuis le 11 mars 2021, nous avons donc une Constitution augmentée d’un article 22ter, dont voici le détail :
“Chaque personne en situation de handicap a le droit à une pleine inclusion dans la société, y compris le droit à des aménagements raisonnables.”
Mais que veut-il dire exactement ?
Chaque personne en situation de handicap …
L’article commence par définir à qui il s’adresse : aux personnes en situation de handicap. Cette formulation n’est pas nouvelle, mais elle permet de remplacer le vocable “handicapés”, jugé outrageant par certains.
Cette manière de définir le handicap est importante, elle rappelle que le handicap ne survient que lorsque l’environnement n’est pas adapté et qu’il place la personne en situation de handicap.
L’objectif n’est pas ici de chercher à formuler ou définir le handicap, mais plutôt de remarquer que, pour la première fois, un texte s’appliquant à tous les Belges reconnaît le caractère situationnel du handicap, et donc la possibilité de l’estomper. L’article 22ter répare la discrimination intrinsèque de la société sur la personne qui est plongée (d’une manière ou d’une autre) en situation de handicap.
A le droit à …
Tous les articles de la Constitution ne confèrent pas des droits. L’article 22ter qui nous intéresse fait cependant partie de ces articles positifs encadrant les droits fondamentaux d’une catégorie de personnes. Désormais, les personnes en situation de handicap sont reconnues par la Constitution comme une catégorie de la population, mais en plus une catégorie de personnes jouissant d’un droit particulier.
Dans le principe, un droit est automatique, il ne doit pas être demandé ou marchandé. Ainsi, l’article 22ter de notre Constitution implique que toute personne en situation de handicap jouit du droit à l’inclusion sans avoir à le demander. Le principe d’un droit, c’est qu’il est rendu obligatoire et sanctionné par l’État. Aller à l’encontre de cette règle constitue donc une entorse à la Loi.
Une pleine inclusion dans la société …
L’article 22ter de notre Constitution donne le droit à une pleine inclusion dans la société. L’inclusion est une transformation de la société dans le but d’en supprimer toute forme d’exclusion sociale. L’inclusion, c’est satisfaire les besoins individuels de chaque personne. Ce qui la différencie de l’intégration, impliquant une adaptation de la minorité à la majorité.
Cette image très connue permet de saisir pleinement la différence entre inclusion et intégration :
L’article 22ter proclame une inclusion qui se veut pleine, c’est-à-dire globale : l’inclusion ne doit pas concerner seulement l’école, l’emploi ou les transports, mais tous les domaines de la vie des personnes en situation de handicap. Avec l’article 22ter, la Constitution consacre une inclusion indivisible.
… y compris le droit à des aménagements raisonnables !
Fort heureusement, l’article 22ter se termine par une précision quant à la “pleine inclusion” dont il garantit le droit : cette inclusion comprend aussi le droit à des aménagements raisonnables. Pour rappel, un aménagement raisonnable est une “mesure appropriée, prise en fonction des besoins dans une situation concrète, afin de permettre à une personne présentant des besoins spécifiques d’accéder, de participer et de progresser, sauf si ces mesures imposent à l’égard de l’établissement qui doit les adopter une charge disproportionnée.”
Nous avions déjà rappelé que le refus d’aménagements raisonnables constituait une discrimination. La bonne nouvelle, c’est qu’en inscrivant les aménagements raisonnables dans la Constitution, ceux-ci deviennent incontournables. De trop nombreuses institutions, écoles ou entreprises refusaient de proposer des aménagements raisonnables, faute d’un public informé et capable de les exiger. Désormais, refuser un aménagement à une personne en situation de handicap n’est plus qu’une discrimination, mais la violation d’une des normes les plus importantes de notre Etat.