Depuis plusieurs décennies, des avancées importantes ont été effectuées en matière d’autisme. Ces recherches mettent en avant un élément qu’il est nécessaire de prendre en compte pour mieux comprendre ce syndrome : la génétique.
Définir l’autisme n’est pas chose aisée. Ainsi, nous nous accorderons à affirmer que les troubles du spectre autistique sont associés à une altération du fonctionnement cognitif. Celle-ci comprend des troubles de la communication et des interactions sociales ainsi que des comportements stéréotypés et des intérêts restreints. Thomas Bourgeron, professeur à l’Université Paris VII et chercheur à l’Institut Pasteur, complète ces éléments de définition en abordant la complexité de ce syndrome. En effet, il souligne le fait que plusieurs personnes d’apparence différentes peuvent être diagnostiquées avec autisme.
Le problème, pour les laboratoires de recherche comme le nôtre, c’est qu’au départ, quand on séquence l’ADN, on a les variations mais on n’a pas la couleur. Tout le travail de mon laboratoire, c’est d’essayer d’identifier la couleur liée à ces lettres.
Thomas Bourgeron
Dans le cadre de leurs recherches, les scientifiques se concentrent sur les quatre composantes du génome : T, G, C, A. Ces dernières apparaissent en couleur sur les écrans informatiques des chercheurs-généticiens. Le vert signifie qu’il y a peu de conséquences pour l’individu, l’orange montre la présence de différences mais la portée de celles-ci est moindre tandis que le rouge indique la possibilité d’un risque accru de maladie.
Les années 2003 et 2006 représentent deux dates clés car elles font référence à l’identification des premiers gènes impliqués dans l’autisme. Dans un communiqué de presse, l’Institut Pasteur explique que ce syndrome est associé aux gènes de la famille SHANK (SHANK 1 – SHANK 2 – SHANK 3). Ils sont impliqués dans le développement et le fonctionnement de circuits neuronaux et dans la formation des synapses (point de communication et de contact entre les neurones).
Les porteurs d’une mutation sur SHANK 3 représentent 2 à 3% des autistes avec déficience intellectuelle. Dans la majorité des cas, chaque gène ne touche qu’un nombre limité de patients. SHANK 3 serait donc considéré comme l’un des gènes majeurs responsables de l’autisme. Les chercheurs ont remarqué que les mutations les plus sévères des SHANK ne sont pas héritées : nous parlons donc d’une mutation de novo (car elle est d’une nouvelle génération).
Les résultats des recherches montrent que les patients ayant un autisme très sévère sont mutés dans ce gène alors qu’il n’apparaît pas chez les personnes non-autistes. Des études de jumeaux ont été réalisées et montrent que le syndrome est génétiquement déterminé. Chez les jumeaux monozygotes (issus du même œuf), la concordance pour la maladie est relativement élevée (80-90%) alors que chez les dizygotes (issus de deux ovules et spermatozoïdes différents), elle est moindre (10-20%). Enfin, l’autisme pourrait correspondre à un syndrome à hérédité complexe. Ce modèle correspond à celui de pathologies comme l’hypertension ou le diabète.
Pour aller plus loin :
ASSOULINE M., BARCIA G., BESMOND C., BODDAERT N., DEMILY C., MUNNICH A., POISSON A., SANLAVILLE D., Apports de la géntique au diagnostic du spèctre autistique, in Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 2016
BIMBAUM Linda S. , LAMBERTINI Luca , LANDRIGAN Philip J. A research strategy to discover the environmental causes of autism and neurodevelopmental disabilities in Environmental Health Perspectives, 2012
BOURGERON T. , A la recherche des gènes de l’autisme, in The Conversation.com, 2018
BOURGERON Thomas, HUGUET Guillaume, Genetic causes of autism spectrum disorders in Science direct, 2016
Communiqué de presse de L’institut Pasteur du 4 sept 2014 : « Autisme : Shank, un gène indicateur de sévérité »
COURCHESNE Valérie, MOTTRON Laurent, Sur le spectre. Magazine du groupe de recherche en neurosciences de l’autisme de Montréal, num 9, Printemps 2020 (lien)
FRIEZ Michael, PATTERSON Wesley G., ZIATS Catherine A., Syndromic autism revisited : review of the literature and lessons learned in Pediatric neurology, 2020
GUEMEZ-GAMBOA Alicia, RYLAARSDAM Lauren, Genetic causes and modifiers of autism spectrum disorders in Frontiers in cellular neuroscience, 2019
RATAJCZAK Helen V., Theoretical aspects of autism : causes – a review in Journal of immunotoxicology; 2011.
SAHIB Mustafa, SRIVASTAVA Siddharth, Autism spectrum disorder and epileptic encephalopathy : common causes, many questions in Journal Of neurodevelopmental disorders, 2017