La Région wallonne et la Fédération Wallonie-Bruxelles ont formé leurs nouveaux gouvernements ce 14 juillet 2024. Les déclarations de politique régionale et communautaire pour les cinq prochaines années détaillent les engagements pris par chaque gouvernement dans ses différents domaines de compétence. Dans cet article, nous abordons les engagements spécifiques du Gouvernement de la Région wallonne en matière de handicap.
Gouvernement wallon
La Wallonie est une région fédérée à pouvoir législatif au sein de l’État belge. Ses compétences sont nombreuses et incluent entre autres l’action sociale dont la politique du handicap, de la famille et de l’aide aux personnes.
Le Ministre-Président est Adrien Dolimont (MR).
Le Ministre de la Santé, de l’Environnement, des Solidarités et de l’Economie sociale, concerné par le handicap, est Yves Coppieters (Les Engagés).
Pour plus d’informations sur sa composition et compétences politiques, veuillez visiter le site du Gouvernement wallon.
Engagements du Gouvernement wallon
Le gouvernement wallon a pris plusieurs engagements concernant les personnes en situation de handicap, sans pour autant consacrer spécifiquement un chapitre de sa Déclaration de Politique Régionale (DPR) à ce sujet. Ainsi nous retrouvons dans des chapitres différents les engagements suivants :
- Mise en accessibilité des sites web pour les personnes handicapées (p. 29 – Chapitre Transformation numérique).
- Ouverture de places dans les Centres de Rééducation fonctionnelle et ambulatoire (p. 47 – Chapitre Santé).
- Droit universel et inaliénable à l’éducation pour chaque enfant (p. 49 – Chapitre Famille).
- Renforcement des dispositifs mobiles de soutien à l’inclusion (DSI) dans les milieux accueillant des enfants à besoins spécifiques (p. 50 – Chapitre Famille).
Dans le Chapitre Action sociale, l’accent est mis sur la simplification administrative, l’évaluation des politiques, la centralisation de l’information, la cartographie de l’offre et des besoins, l’adoption par l’administration du langage facile à lire et comprendre (FALC). Les engagements spécifiques pour le handicap sont les suivants :
- Adoption d’une assurance autonomie avant la fin de la legislature (p. 56).
- Proposition d’un Plan Interfédéral “Aidants Proches” pour une reconnaissance, un soutien et un accompagnement renforcés, quel que soit le statut socio-professionnel de l’aidant (p. 56).
- Evaluation de l’application transversale du principe de handistreaming, soit l’intégration des besoins des personnes handicapées dans toutes les politiques publiques (p. 56).
- Dans le cadre de la Conférence Interministérielle (CIM) Handicap et de la CIM Santé, amélioration de l’accessibilité au diagnostic précoce pour toute forme de handicap, avec une attention particulière pour l’autisme (p. 57).
- Renforcement des Centres de Référence Autisme et garantie de leur accessibilité sur l’ensemble du territoire wallon (p. 57).
- Encadrement de l’accompagnement à la vie intime, affective et sexuelle en toute sécurité pour les personnes handicapées et leurs accompagnants (p. 57).
- Renforcement de dispositifs diversifiés de répit pour les personnes et leurs familles (p.57).
- Réalisation d’ici la mi-2026 d’une étude d’analyse des besoins en matière d’accueil et hébergement sur base de la liste unique de l’AVIQ et du nombre des cas prioritaires, pour résorber le manque de places et assurer une équité territoriale (p. 57).
- Suite à l’analyse des besoins, adaptation du nombre de places agréées dans les différentes structures et création de nouvelles places subventionnées, avec une attention particulière à la diversification de l’offre (p. 57).
- Lancement d’un nouveau Plan ERICh de 100 millions d’euros pour réhabiliter les structures d’accueil et d’hébergement pour les personnes handicapées, avec un focus sur l’autisme. Le financement pourrait venir d’un bon d’Etat wallon (p. 57).
- Attention particulière à la situation des Services dont l’Agrément et le Financement dépendent d’une Autorité Étrangère (SAFAE) pour maintenir l’offre de services et l’emploi en Wallonie, ainsi qu’aux services partiellement subventionnés (p. 57).
- Mise en place de réponses adéquates pour les personnes ayant un double diagnostic (p. 57).
- Garantie de l’accessibilité physique et numérique de l’information aux personnes en situation de handicap (p. 57).
- Développement d’une stratégie “Accessibilité” pour à terme garantir une accessibilité universelle, avec des objectifs précis pour les 15 prochaines années (p. 57).
- Optimisation du transport scolaire et réduction des temps de transport avec la proposition de mesures alternatives accessibles financièrement (p. 57 et p. 74).
- Dans le cadre de l’emploi ordinaire, simplification des démarches administratives afin de mieux bénéficier des dispositifs d’accompagnement et d’aménagement et de créer davantage d’emplois (p. 57).
- Mise en place de dispositifs d’apprentissage internes aux ETA ainsi que de différentes autres mesures pour favoriser et augmenter l’emploi des personnes avec un handicap plus sévère (p. 58).
- Respect du quota de 3% d’emplois de personnes handicapées dans le secteur public avec sanctions financières à la clé (p. 58).
- Soutien aux démarches de “handiprenariat” (p.58)
- Suppression au niveau fédéral du “prix du travail”, soit la perte automatique du droit aux allocations de remplacement de revenu si l’on travaille (p. 58).
- Développement de projets de construction et rénovation de logements accessibles et adaptables aux personnes en situation de handicap (p. 66).
- Renforcement de l’accessibilité des transports en commun, y compris le matériel roulant et les quais (p. 74).
- Pérennisation du soutien à la Ligue Handisport Francophone pour avis et conseils (p. 99).
Consultez la Déclaration de Politique Régionale du Gouvernement Wallon
Que faut-il en penser ?
Notre avis ne concerne ici que les questions relatives au handicap de grande dépendance. Notons, en ligne générale, une volonté de simplification administrative qui correspond à un véritable besoin mis en exergue par le monde associatif. Il y a aussi une volonté de plus grande efficacité (cartographie des besoins, centralisation de l’information…) et d’évaluation des politiques, ce qui correspond à la demande d’une partie du secteur, dont notre association.
Concernant plus spécifiquement le handicap de grande dépendance, notons que cette appellation a disparu et est remplacée par “les cas prioritaires”. Cela est bien dommage car les situations de handicap plus sévères demandent des interventions très spécifiques. Force est de constater que lorsque la pression citoyenne et associative baissent, les priorités peuvent vite changer : dans le domaine du handicap, il n’y a pas de droits acquis !
Certains engagements reflètent néanmoins une partie de nos revendications. Nous saluons la place accordée à l’augmentation et la diversification de l’offre de services d’accueil et d’hébergement, mais aussi à l’adoption de mesures favorisant l’autonomie. Nous saluons l’attention portée à l’autisme, le renforcement des Centres de référence et des centres de rééducation fonctionnelle, l’engagement pour améliore le diagnostic précoce de tous les handicaps, ainsi que les engagements pris pour l’amélioration des transports scolaires.
Il reste néanmoins de nombreuses demandes ignorées par les partis au pouvoir et surtout une absence flagrante de mesures claires et précises permettant de mettre en oeuvre les engagements annoncés. Par exemple, une cartographie des besoins devrait être suivie de l’engagement à une programmation d’ouverture de services. Quid des investissements dans le cadre du Plan ERICh ? La renovation des structures ne permettra pas d’anticiper la création de places pour les adultes en situation de grande dépendance vivant chez eux et dont les parents ne peuvent plus s’occuper.
Nous signalons une grosse déception concernant l’oubli des bonnes pratiques d’accompagnement recommandées par nos instances nationales dans les centres de rééducation et en général dans toutes les structures subsidiées. Rappelons que ces pratiques sont indispensables pour obtenir des résultats appréciables (documentés dans les centres équivalents flamands). Puisqu’on parle d’évaluation des services, nous rappelons que plusieurs parmi eux n’ont pas mis à jour leurs pratiques obsolètes, voire délétères pour le développement des jeunes enfants. Compte tenu des subsides importants accordés à ces centres, les bonnes pratiques devraient être rendues obligatoires ! Et qu’en est-il de la formation ? Pourquoi n’impose-t-on pas l’obligation de formation adaptée aux professionnels ? Seules des formations et supervisions adéquates pourront prévenir le développement des sur-handicaps éducatifs et contribueront à une plus grande autonomie des personnes à l’âge adulte. Nous dénonçons ce gaspillage inacceptable du potentiel de nos enfants et aussi de l’argent public !
La route vers un accompagnement optimal de nos enfants handicapés est malheureusement encore longue et nous ne pouvons pas, hélas, relâcher la pression !