Comme chaque année, ce dimanche 16 octobre, c’est la grande soirée de Cap48 ! Et c’est une édition toute particulière puisque les dons récoltés soutiendront la recherche médicale sur l’autisme. Une émission qui sera, pour la première fois, intégralement proposée en langues des signes.
Démarrée officiellement le 6 septembre, la campagne de Cap48 s’est accompagnée d’une programmation de films sur le handicap et de documentaires sur l’autisme. Notamment, le célèbre film Hors Normes, ou le documentaire sur Lou Boland, que vous pourrez revoir sur Auvio.
Mais ce qui a fait le plus parler, c’est la campagne publicitaire de Cap48. Une campagne qui n’a pas manqué de choquer le grand public. Dans un spot télé, on peut y voir un enfant dans un supermarché. L’enfant dépose un paquet de bonbons dans le caddie, le père le remet en rayon… et c’est la crise ! Hurlements, l’enfant se jette à terre, frappe au sol, jette tout à terre… tout ça sous les regards des autres clients, qui doivent se dire… “quel sale gosse“.
Cette scène, tous les parents d’un enfant différent l’ont déjà vécue. La vidéo se termine par cette phrase “l’autisme touche une famille sur 66“, rappelant l’importance de prendre en compte, certes la personne autiste, mais aussi toute la cellule familiale qui l’entoure et l’accompagne.
Si, pour de nombreux parents d’enfants handicapés, ce spot publicitaire a mis en lumière des réalités bien concrètes et trop souvent tues : le jugement des autres, la honte, la culpabilité, le caractère envahissant des troubles de l’enfant, … cette publicité n’a pourtant pas fait consensus :
Pour Claude, ce bruit est devenu insupportable. Il demande d’arrêter la diffusion des spots : “Il est devenu pour nous insupportable d’être perturbés et agressés à répétition par les cris d’un enfant qui hurle. Cette publicité nous oblige à couper l’émission tellement ces cris perçants nous blessent littéralement. En fin de compte, cette publicité est négative à tous points de vue et n’atteint certainement pas l’objectif visé. Au contraire elle donne envie, surtout, de ne plus en entendre parler !“
La campagne de CAP 48 fait-elle trop de bruit ?
Un article de la RTBF nous rappelle que le choix de la provocation et du choc pour faire passer des idées n’est pas nouveau. Médecins sans frontière, Amnesty International ou la prévention à la sécurité routière, utilisent aussi ce type de publicité. Notre propre mouvement, le GAMP, avait été fort critiqué pour notre campagne de 2013, qui s’intitulait Imaginez-vous handicapé de grande dépendance. A l’époque, le journal Le Soir avait même rédigé un article Faut-il choquer pour nous sensibiliser ? En 2011, Cap48 avait aussi choqué avec son détournement de la publicité Wonderbra.
La question ne date donc pas d’hier.
Plusieurs études montrent l’efficacité de ce type de publicité, en particulier auprès des publics non-acquis à la cause, c’est-à-dire les non-donateurs ou les donateurs ponctuels. Plus l’émotion véhiculée par la campagne est forte, plus l’adhésion au message est importante. Bousculer et heurter engagent les consommateurs à agir.
La campagne de CAP 48 fait-elle trop de bruit ?
Ce qui est sûr, c’est que le secteur du handicap peine à sensibiliser le grand public. Les campagnes de communication douces et jolies, fondées sur l’espoir, la bienveillance, la positivité, ne font pas rendre compte de la réalité, de son âpreté, ainsi que de l’isolement et du manque de solutions que subissent les parents. Loin de sensibiliser, ces campagnes peuvent parfois mener à l’effet inverse, et prolonger l’invisibilisation des publics handicapés. Elles ne portent donc leurs fruits ni pour le grand public, ni pour les parents – qui se sentent une nouvelle fois incompris.
Face aux différentes critiques, la responsable de la communication de Cap48 s’est exprimée :
Ces cris, ces crises sont devenues le point d’entrée pour faire comprendre au grand public la difficulté dans laquelle les enfants et les parents se retrouvent. ” Nous savions que la campagne serait sans doute rejetée par certains ” dit Cap 48 mais nous voulions attirer l’attention sur cette réalité.
La campagne de CAP 48 fait-elle trop de bruit ?
Dans la campagne de Cap 48, ces informations viennent rapidement après la brutalité des cris. Pour expliquer qu’ils font partie de la réalité des personnes autistes. Cap 48 voulait tordre le cou aux idées reçues : il y a une mauvaise connaissance de l’autisme, qu’on associe facilement à des grands personnages de fiction comme Charlie Babbitt dans le film Rainman, dit Anne-Laure Macq responsable de la communication de Cap 48.
Pour répondre à l’article de la RTBF : la campagne de Cap48 fait-elle trop de bruit ?
Non, elle n’en fait pas de trop. Car le bruit entendu dans cette vidéo est celui d’enfants bien réels. Des enfants qu’on n’entend pas parce qu’ils sont cachés ou séparés des autres : en institution, dans des écoles différentes, des bus différents. Crier, c’est parfois le seul mode de communication que ces enfants ont. Leur seule fenêtre d’expression sur le monde.
Dire que la campagne de Cap48 fait trop de bruit reviendrait à dire que nos enfants en font de trop.
Or, au vu de la manière dont le handicap est traité par les politiques publiques, au vu du manque de visibilité de ces publics et du manque de places données à ces personnes, force est de constater que, non, nos enfants ne font pas encore assez de bruit.